Article de L’express
Nucléaire : le travail de sape de l’Allemagne contre la France
Au travers de certaines fondations politiques, notre voisin chercherait à affaiblir l’industrie nucléaire française.
Par Sébastien Julian, journaliste du magazine L’express
Une tour de refroidissement de la centrale nucléaire d’Emsland avec un slogan projet par des activistes “Énergie nucléaire – plus jamais”, à Lingen, dans l’ouest de l’Allemagne, le 10 avril 2023
Elles se nomment Rosa Luxemburg, ou encore Heinrich Böll. Ces fondations politiques allemandes ne font pas la une des médias. Elles affaiblissent pourtant sciemment la filière nucléaire française, dénonce un rapport récent de l’Ecole de guerre économique. Leurs armes ? La rédaction de documents au narratif antinucléaire, l’orientation des élites par le biais de formations – bourses doctorales, masterclass… -, les visites et rencontres de responsables politiques étrangers, l’alliance avec certaines ONG ou partis écologistes…
Ce travail d’influence bénéficie de moyens financiers importants. Selon le rapport, la dotation générale consacrée à l’ensemble des fondations politiques par le Bundestag ne cesse d’augmenter : 295 millions d’euros en 2000, plus de 466 millions en 2014, et 690 millions pour l’année 2023 ! Pour son auteur Christian Harbulot, le message est clair : derrière les discours de façade prônant la coopération entre pays membres de l’Union européenne, l’Allemagne fait tout ce qui est en son pouvoir pour ne pas laisser l’industrie française jouir d’une énergie bon marché et profiter ainsi d’un avantage compétitif important.PUBLICITÉ
Des propos qui font écho à ceux de l’ancien patron d’EDF Henri Proglio. “L’obsession des Allemands depuis trente ans, c’est la désintégration d’EDF. Ils ont réussi”, avait-il déclaré en décembre dernier lors de son audition menée dans le cadre de l’enquête parlementaire sur la perte d’indépendance énergétique de la France. Dans un dossier récent, L’Express racontait lui aussi les efforts menés par notre voisin au niveau européen pour exclure le nucléaire de tout mécanisme de soutien financier. Mais avec des fondations comme Heinrich Böll, qui bénéficie d’une adresse à Paris, le travail de sape s’effectue également sur le sol français souligne l’Ecole de guerre économique.
Fort de ce constat, le rapport préconise la création d’une mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives des fondations politiques étrangères. Construit sur le modèle de la Miviludes dont l’objet est de lutter contre les dérives sectaires, cet organisme permettrait de sensibiliser le grand public et de limiter l’impact des actions menées à l’encontre de la France. “La parution de ce rapport nous incite surtout à être moins naïf”, souligne un expert de l’énergie. En matière de nucléaire, la France durcit justement le ton depuis quelques mois. C’est un bon début.
LIRE AUSSI >> Nucléaire, une faillite française : l’arrêt du projet Astrid, “une erreur historique”