Gratuité et vice du consentement, moteurs du développement du capitalisme américain aux XIXe et XXIe siècles ?

Les Yeux, Mauvais, Sans Visage, Cheveu, Angoissant

Par Olivier Soubie, auditeur de la MSIE 35 de l’EGE.

Il ne se passe pas un jour sans que les géants du numérique, les GAFA (1) ne fassent la une des médias pour un motif ou un autre : nouveau produit, nouvelle acquisition d’une start-up ou d’une licorne, procès, parts de marché dans les activités publicitaires. Les livres, articles et commentaires existants comparent souvent les GAFA à la Standard Oil de John D. Rockefeller surtout depuis les commissions d’enquête sénatoriale américaines sur la distorsion de la concurrence et les amendes infligées dans divers pays par les autorités de la concurrence.

Nous pensons que les ressorts principaux du développement des GAFA sont avant tout la gratuité des données des utilisateurs et le vice de consentement associé à la collecte et au traitement de ces données. La « data » collectée par les GAFA suscite, aujourd’hui, des réactions des gouvernements des Etats nations, qui se sentent piqués au vif dans leur puissance par ces acteurs privés y compris aux Etats-Unis, et ce pour ce dernier pays, malgré leur étroite collaboration avec les agences fédérales américaines dans le cadre du dispositif de sécurité nationale américain (2) et leur contribution à la puissance économique des Etats-Unis mise à mal par les ambitions chinoises.

La comparaison entre l’industrie du coton et l’industrie des Datas

Au-delà des questions de liberté individuelle et de démocratie soulevées par les scandales numérico-politiques de 2016 – rôle de Cambridge Analytica dans le vote pro-Brexit britannique et l’élection de Donald Trump, la « data », souvent comparée à l’or noir, est à l’origine du pouvoir économique de ces mastodontes. Dans le domaine économique, nous comparons, pour notre part, la « data » au coton plutôt qu’à l’or noir, coton aussi baptisé or blanc ou roi coton par certains, en son temps. Il est utile de rappeler que le Comte Alexis de Tocqueville aurait écrit dans une lettre à son père, préfet nommé par Napoléon : « le prix du coton occupe plus de place dans les journaux que les questions générales sur le gouvernement »

Le coton, un des moteurs de la première révolution industrielle, « data » du XIXe siècle ?

Selon l’historien américain Edward Baptist, professeur à l’université Cornell et spécialiste de l’histoire du capitalisme (3), entre le 4 juillet 1776 – déclaration d’indépendance des Etats-Unis – et la guerre de Sécession (1861 – 1865), le Sud des Etats-Unis est passé d’une étroite bande côtière de plantations de tabac à un empire cotonnier continental (4). Or, cette période correspond à la période de la première révolution industrielle et à la naissance de la seconde révolution industrielle (5). La première révolution industrielle s’appuie sur la technologie de la machine à vapeur et le charbon. Cette révolution industrielle se déroule, grosso modo, entre 1770 et 1850, selon les pays (6).

Le coton, une bénédiction économique pour la jeune démocratie américaine….

La concomitance de trois facteurs clefs de succès et d’une circonstance historique ont permis à la jeune démocratie américaine d’émerger économiquement :

  • Des terres très adaptées à la culture du coton dans les Etats du Sud,
  • L’égreneuse de coton (« cotton gin » en anglais) brevetée par Eli Whitney en 1794 a révolutionné l’industrie du coton en réduisant fortement l’intensité de main d’œuvre nécessaire pour l’élimination des graines et des cosses de la fibre de coton. Eli Whitney estimait, dans une lettre envoyée à Thomas Jefferson, que sa machine multipliait par 50 la productivité (7)
  • Eli Whitney estimait, dans une lettre envoyée à Thomas Jefferson, que sa machine multipliait par 50 la productivité (7).
  • L’importation aux Etats-Unis en 1789, par Samuel Slater – sujet britannique – des secrets des métiers à filer et à carder de Richard Arkwright alors même que le gouvernement britannique avait promulgué une loi interdisant d’une part l’émigration de personnes ayant des connaissances techniques sur ces machines et d’autre part l’exportation d’informations sur ces technologies.
  • Les tensions commerciales entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni qui débouchent sur la guerre de 1812-1815 poussent, par instinct de survie, les magnats du transport maritime de la Nouvelle Angleterre à utiliser leurs capitaux pour créer des manufactures textiles avec notamment la création des « Boston Associates » dont Francis Cabot Lowell est l’un des plus célèbres membres.

Le coton est au début du XIXe siècle ce que le pétrole allait devenir au XXe siècle et ce que la « data » est devenue ou en passe de le devenir au XXIe siècle : une matière première déterminante pour la richesse des nations (8) et particulièrement pour la jeune démocratie américaine. Cette dernière a réussi à créer en quelques décennies une industrie cotonnière efficace et intégrée verticalement même si ses produits finis servent essentiellement le marché intérieur et non extérieur.

Dont le poids permet une excellente insertion dans la division internationale du travail et les échanges commerciaux mondiaux du XIXème siècle

En effet, le « roi-coton » qui comptait pour 14% des exportations en valeur des Etats-Unis en 1801 puis 49% en 1821 et 61% en 1860 selon Edward E. Baptist (9) voire 2/3 des exportations des Etats-Unis à cette même date selon d’autres auteurs (10), a fondé la prospérité économique de la jeune nation.

Les Etats-Unis exportaient vers l’Europe son coton qui, par ses propriétés physiques, était facilement transportable et lavable plusieurs fois avec une excellente tenue des couleurs. Fort de ces propriétés déjà connues depuis l’Antiquité mais surtout grâce aux progrès technologique permettant une production et une transformation à faible coût, le coton a, naturellement, été adopté par les industriels et consommateurs et a supplanté, assez vite, la laine et le lin principales matières premières de « l’industrie textile de masse » existante.

En 1853, Israël D. Andrews, un expert du commerce dit au Congrès que « les sols, les saisons, le climat, et le travail d’aucun pays ne peut concurrencer avec succès ceux de cette vaste région de la confédération nommée à juste titre la zone du coton »

A la veille de la guerre de Sécession en 1860, les Etats-Unis produisaient 66% de la production mondiale de coton (11). Les Etats-Unis fournissaient à la Grande-Bretagne, selon les sources, entre 77% (12) et 88% de ses importations de coton (13) (90% pour la France, et 92% pour la Russie (14)).

C’est sur cette période que se développent en Nouvelle-Angleterre (15) les manufactures de coton, sur un modèle né à l’initiative de Samuel Slater, immigré anglais arrivé en 1789 et considéré par le Président Andrew Jackson comme « le père de la révolution industrielle américaine » mais surnommé au Royaume-Uni « Slater, the traitor » car il a emporté avec lui les secrets industriels britanniques de Richard Arkwright contrevenant ainsi aux lois en vigueur du Royaume-Uni.

L’importance du coton comme moteur économique, au plan mondial (16), perdure jusqu’à la veille de la première guerre mondiale, époque à laquelle l’industrie textile représente, en France, encore un tiers de la production industrielle totale et encore environ 20% des exportations industrielles allemandes et anglaises (17).

Une main d’œuvre de plus en plus nombreuse……

Dans le Sud des Etats-Unis, la population est essentiellement agricole et peu urbanisée. En effet, en 1860, 84% de la population active travaille dans le secteur primaire contre 40% pour les Etats du Nord. 10% de la population est urbaine dans le Sud contre 1/3 dans les états du Nord. Le Sud ne produit que 9% de la production manufacturière des Etats-Unis (18).

Ainsi, en 1860, la population américaine est d’environ 31,4 millions de personnes selon les données du « US Census Bureau » de 1860 : 22,3 millions d’habitants dans l’Union et

9,1 millions au sein des Etats Confédérés (19).

Malgré le vote du Congrès américain en 1807 (entrée en vigueur au 1er janvier 1808) de l’interdiction d’importation de nouveaux esclaves (article 1, section 9 de la Constitution des Etats-Unis abrogé par le XIIIème amendement en 1865), les esclaves noirs sont presque 4 millions en 1860 alors qu’ils n’étaient qu’à peine 700 000 sur le sol américain en 1790. Ces 4 millions d’esclaves sont essentiellement localisés dans les Etats du Sud des Etats-Unis (20).

Cette augmentation de la population d’esclaves entre 1790 et 1860 s’explique non seulement par la natalité mais aussi par un trafic illégal qui perdure après 1808. Notamment, la réexportation vers les Etats-Unis, via la Floride espagnole, des esclaves noirs débarqués à Cuba au bénéfice des marchands de Rhode Island, état nordiste partie de la Nouvelle Angleterre (où s’est installé Samuel Slater, cf ci-dessus) est estimée à environ 20 000 esclaves par an.

Les importations illégales et le commerce continuent donc, d’autant plus qu’avec le « cotton boom », le prix des esclaves noirs augmente aux États‑Unis. Les célèbres « clippers », navires à voile rapides construits à Baltimore et les autres ports de la Nouvelle Angleterre, leur permettent de distancer la marine anglaise qui tente de lutter contre la traite négrière. Après 1830, c’est New-York qui devient la base principale de la flotte négrière américaine, suivie par Baltimore, la Nouvelle‑Orléans et Portland, dans le Maine. Après 1836, le Texas devient également une bonne base d’opérations, puisque cette république brièvement indépendante n’avait signé de traité avec personne : 15 000 esclaves y sont introduits en 1837 (21).

Ainsi, selon de nombreux historiens, l’égreneuse de coton (cotton gin) aurait considérablement renforcé la traite des esclaves en rendant la culture du coton si rentable que les producteurs ont réduit en esclavage davantage de personnes. La culture du coton est devenue la principale source de richesse dans le sud des États-Unis et a contribué à l’expansion vers l’ouest de la Géorgie au Texas. Si l’égreneuse à coton a fait du « King Cotton » une force économique américaine dominante, il a également soutenu l’esclavage en tant qu’institution économique et sociale dans les États du Sud

Travaillant sous le coup d’un vice du consentement

Notre Code Civil, dans son article 1130 dans sa version actuelle ou 1109 (22) dans sa version originelle du 7 février 1804 promulguée le 17 février 1804 nous enseigne que la violence vicie le consentement.

La formulation de l’article 1130 d’aujourd’hui sous-entend par sa formulation que la violence est la forme de vice du consentement la plus grave : « L’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. »

Ce vice du consentement est décisif pour l’acquisition d’un avantage compétitif permettant une bonne insertion dans la division internationale du travail de l’économie américaine. Contrairement à l’argument communément avancé et énoncé, ci-dessus, sur l’adéquation particulière des terres et du climat du Sud des Etats-Unis pour la culture du coton, les planteurs les plus intelligents avaient bien compris que leur avantage compétitif reposait sur la quasi gratuité et la fiabilité du travail des esclaves (23).

C’est pourquoi, parmi les trois facteurs clefs de succès identifiés plus haut, il nous semble opportun de remplacer le premier relatif aux conditions géo-climatiques par la quasi-gratuité de la main d’œuvre et le vice du consentement. C’est bien grâce à la coercition physique avec l’administration de coups de fouet en cas de non atteinte des objectifs quotidiens de récolte que les grands planteurs du Sud des Etats-Unis ont réussi à obtenir une grande efficacité de leurs esclaves.

La compétitivité prix ainsi obtenue a permis, d’une part, aux Etats-Unis de trouver leur place dans la division internationale du travail, et d’autre part, a eu un rôle déterminant dans la prise de contrôle du marché mondial du coton et dans la mutation de la jeune démocratie en une nation puissante et prospère.

D’autres acteurs privés bénéficient de la gratuité du travail et du vice de consentement associé à l’esclavage

L’histoire, racontée par les manuels scolaires américains, décrit l’esclavage comme une anomalie historique au sein d’un pays dont les valeurs fondamentales sont la démocratie et la liberté. En portant l’attention sur les Etats du Sud uniquement sans analyser les dynamiques d’ensemble, l’esclavage est présenté comme un égarement dans la marche vers la modernité de la jeune nation américaine et certainement pas comme le moteur de sa prospérité. Or, il semble que cette grille de lecture soit fallacieuse et constitue plus un mythe du roman national américain qu’une réalité.

En effet, le livre « Complicity: How the North Promoted, Prolonged, and Profited from Slavery » d’Anne Farrow, Joel Lang et Jenifer Frank met en évidence les liens entre la bourgeoisie du nord et le système esclavagiste des Etats du Sud.

Ainsi, pour prendre en compte à sa juste mesure le rôle primordial de l’esclavage et donc de la quasi-gratuité de la main d’œuvre dans la génèse du capitalisme américain, il suffit de se pencher sur l’histoire de quelques grands noms de l’économie américaine (NB : tous les exemples ci-dessus proviennent du premier chapitre, « Cotton comes North », de l’ouvrage collectif d’Anne Farrow, Joel Lang et Jenifer Frank, et ne constituent pas un inventaire exhaustif. Des compléments d’information sur les exemples en question sont soit sourcés dans les notes soit font l’objet d’un lien hypertexte).

Le magnat de l’immobilier et du transport maritime John Jacob Astor (1763-1848), premier millionnaire de l’histoire des Etats-Unis a fait fortune en tant que négociant en fourrures et dans le commerce international avec la Chine (thé, porcelaine, soie, opium …) mais ses bateaux, comme ceux de nombreux magnats du transport maritime du nord des Etats-Unis, transportaient aussi des tonnes de coton produites par les esclaves noirs.

Trois frères, marchands généralistes de Montgomery, capitale de l’Alabama, pratiquant le troc, se sont progressivement transformés en courtier en coton à tel point qu’ils ouvrent un bureau à New York en 1858 : ainsi débute la légende des frères Lehman.

Durant la guerre de sécession, ils arrivent à élaborer plusieurs stratégies de contournement du blocus réalisé par l’Union à l’encontre des Etats Confédérés notamment l’une de ces stratégies consiste à expédier le coton en Angleterre puis à le réexpédier d’Angleterre vers New-York.

En 1870, ils participent à la création du New York Cotton Exchange où plus d’une centaine de courtiers en coton traitent à terme du coton non encore récolté. Puis, ils diversifient leurs activités de courtage en négociant du café, du sucre, du cacao puis du pétrole.

Warren Buffet, célèbre milliardaire, est le PDG de Berkshire Hathaway. Berkshire Hathaway est l’héritière d’une firme de textiles de Rhode Island dont les bénéfices étaient assurés par l’esclavage. La Nouvelle-Angleterre abritait certes des abolitionnistes américains mais aussi l’industrie textile qui s’enrichissaient grâce au coton produit par les esclaves noirs du sud.

Junius Morgan (1813-1890), père de John Pierpont Morgan fondateur en 1871 de la banque JP Morgan, a fait en sorte que son fils étudie le commerce du coton dans le Sud au début de sa carrière. Junius Morgan, originaire du Massachusetts qui était devenu un banquier et courtier en coton important de Londres avait compris que la compréhension du commerce du coton était essentielle pour pouvoir prospérer dans le monde des affaires des années 1850.

Certains de ces bénéficiaires vont devenir des symboles du tout puissant capitalisme financier américain

Canal Bank and Citizens’ Bank, rachetées en 1931 par Chase Manhattan Bank qui a fusionné avec JP Morgan en 2001, avaient accepté, en Louisiane, entre 1831 et 1865 approximativement 13 000 esclaves comme garanties sur des prêts, et avaient pris possession d’approximativement 1 250 esclaves en raison du défaut sur certains prêts accordés aux planteurs.  Pour mémoire, les établissements financiers d’aujourd’hui issus de cette filiation sont, outre JP Morgan Chase, Morgan Stanley et Deutsche Bank (via Morgan, Grenfell & Co).

Citibank, Bank Of America and Wells Fargo ont aussi bénéficié de la traite des esclaves.

A l’origine, les planteurs qui souhaitaient lever des fonds pour acheter des bateaux, des marchandises, voire des esclaves s’endettaient sur les marchés de capitaux à Londres. Plus tard au cours du XIXème siècle, les banques américaines vendaient des titres, vraisemblablement des obligations pour permettre aux planteurs du Sud de financer l’expansion de leur plantation.

De même, les compagnies d’assurance ancêtres d’Aetna, New York Life, AIG et Lloyds Londres ont émis des polices d’assurance pour se protéger des naufrages de navires négriers et du décès ou de l’invalidité d’esclaves avec comme bénéficiaire les propriétaires de ces mêmes esclaves.

Les relations économiques étroites entre les Etats Confédérés et les Etats de l’Union illustrent bien toute l’ambivalence de l’histoire du capitalisme américain dès sa génèse.

Certaines estimations évaluent à 40 % le montant du chiffre d’affaires des plantations de coton revenant aux Etats du Nord sous forme de frais, commissions, fourniture d’outillage pour l’exploitation agricole et fourniture de biens divers nécessaires au train de vie des planteurs Sudistes.

Un véritable commerce triangulaire du coton existait. Les bateaux revenant d’Europe remplis de produits textiles anglais et européens étaient déchargés à New-York, véritable plaque tournante de la distribution de ces produits sur tout le territoire américain qui constituait un débouché énorme. La distribution se faisait essentiellement via la navigation fluviale et côtière. Une fois, les bateaux déchargés des produits textiles, ils remontaient des ports de Charleston, Savannah et de la Nouvelle Orléans vers les états du Nord avec les cales pleines de coton.

Enfin, Fernando Wood, maire démocrate de New-York et magnat du transport maritime a déclaré devant le Conseil Municipal (Common Council of the City of New-York) dans son discours sur l’état de New-York, le 7 janvier 1861 que la ville de New-York devrait faire sécession et rejoindre les Etats du Sud Confédérés en raison de la dépendance de la ville au commerce du coton. Pour mémoire, dès 1822, quatre ans seulement après le démarrage de la liaison maritime « Black Ball Line » entre Liverpool et New-York, le coton représentait 40% des exportations du port de New-York. En intégrant le riz et le tabac, autres cultures provenant du Sud des Etats-Unis, plus de 50% des exportations de New-York étaient adossées à l’exploitation des esclaves noirs du Sud des Etats-Unis.

Le passé obscur de Wall Street

Les premiers colons à occuper les lieux, des Hollandais, ont fait construire par des esclaves un mur pour se protéger des Indiens et des Anglais. Ce mur détruit en 1699 par les Anglais est l’une des deux explications au nom de Wall Street (24).

Le Conseil Municipal de New-York établit à Wall Street le 13 décembre 1711 un marché aux esclaves. Celui-ci existera jusqu’en 1762.

La quasi-gratuité de la main-d’œuvre et le vice du consentement ont ainsi été les principaux moteurs de l’accroissement de puissance économique des Etats-Unis du XIXème siècle et des facteurs clé dans le développement industriel et financier initial du Nord-Est des Etats-Unis. Or, ce dernier a eu un impact prépondérant puisqu’il a permis, au gré des circonstances historiques du XXème siècle avec les deux guerres mondiales et la guerre froide, de supplanter économiquement, culturellement et idéologiquement les nations européennes qui dominaient jusqu’alors le monde.

Il est remarquable de constater que deux siècles plus tard les mêmes moteurs sont à l’œuvre et qu’ils produisent peu ou prou les mêmes effets en matière de puissance économique, culturelle et idéologique américaine.

La gratuité : péché originel à double face des plus importantes plateformes internet

Google et Facebook se sont développés sur un modèle d’affaires de services gratuits pour les utilisateurs mais financé par les publicités. Il est à noter que Facebook n’a basculé dans le modèle publicitaire qu’à partir du printemps 2008 pour devenir bénéficiaire en 2010 soit plus de 6 ans après sa création le 4 février 2004. Ce basculement s’est fait juste après l’arrivée chez Facebook de Sherryl Sandberg, ex « Vice President of Global Online Sales and Operations » chez Google et surnommé le « Typhon Marie » par Shoshana Zuboff, professeur à Harvard et auteur du livre « l’Age du Capitalisme de Surveillance »

Le modèle d’affaires publicitaire de l’internet était à l’origine et demeure aujourd’hui le premier mode de génération de chiffre d’affaires sur Internet : ce paradigme a été décrit, en France, dès 1999 dans un livre « les Business Models de la Nouvelle Economie » (25).

Ce modèle permet aux plateformes de recruter des utilisateurs et d’avoir, ainsi, une audience publicitaire à proposer aux annonceurs.

Le revers de la médaille de la gratuité du service pour l’utilisateur est la vente aux annonceurs et à des « data brokers » (ou courtiers en données) des données personnelles des utilisateurs recrutés, acquises gratuitement, selon l’adage « si c’est gratuit, c’est toi le produit ! ».

Data brokers : des acteurs Business to Business peu connus du grand public européen

Les « data brokers » se sont développés aux Etats-Unis dans les années 70, bien avant l’internet grand public et à la faveur du « Fair Credit Reporting Act » du 26 octobre 1970. Le FCRA régit comment les « bureaux de crédit » peuvent collecter et partager les informations sur les particuliers. Les banques ou les compagnies d’assurances demandent les « rapports de crédit » individuels produits par les « bureaux de crédit » avant d’accorder un prêt ou d’émettre une police d’assurance. Les consommateurs font véritablement l’objet d’une notation financière. Les « bureaux de crédit », dont les plus connus sont Equifax, Experian (en fait, société irlandaise qui a racheté des activités américaines de « bureau de crédit »), Transunion, ont progressivement investi le champ plus large du marketing direct en collectant des données personnelles sur des dizaines de millions d’américains pour compléter les données obtenues dans le cadre de leur métier d’origine. Deux autres grands « data brokers » ont une origine différente. Tout d’abord, le plus ancien et le leader actuel, Acxiom a commencé par fournir des données utilisables pour la politique locale et Corelogic, le plus jeune, né en 1991 a commencé avec les données du secteur immobilier.

L’élargissement du champ de collecte d’information par rapport à leur secteur d’origine a été facilité par l’absence de loi portant sur les données à caractère personnel.

En effet, il n’existe pas encore, à ce jour, de loi fédérale, donc de portée générale, aux Etats-Unis régissant la collecte et l’utilisation de données à caractère personnel. Seules des lois de portée limitée – par activité ou par état- existent. Notamment, la Californie, berceau de la Silicon Valley, a promulgué (en droit californien : « effective ») le « California Consumer Privacy Act » (CCPA), très ressemblant au Règlement Général sur les Données Personnelles, qui ne sera mis en œuvre (en droit californien : « operative »), en pratique, qu’en 2023.

Ces acteurs, inconnus du grand public, ont donc grandi à l’abri de contraintes réglementaires sur les données privées pendant plusieurs décennies. Leur mode de fonctionnement ou modèle d’affaires reste confidentiel tant ils cultivent la discrétion sur leurs activités.

Les rares chiffres qui perlent dans les médias sur les données dont les « data brokers » disposent parlent d’eux-mêmes.

Selon le site ZDnet, Acxiom aurait possédé en 2012 jusqu’à 1 500 données sur les internautes américains. Le nombre de données collectées s’avérait toutefois moins importants s’agissant des autres internautes, tels que les internautes français. D’après Jed Mole, directeur marketing d’Acxiom Europe : « L’entreprise a collecté jusqu’à 600 données par foyer sur 6 millions de foyers français » en 2012.

Patrick Waelbroeck, professeur d’économie à l’Ecole des Télécommunications de Paris, Chaire Valeurs et Politique des Informations Personnelles indique que, dès 2015, Franck Pasquale professeur de droit à l’Université du Maryland et auteur du livre « The Black Box Society: The Secret Algorithms that Control Money and Information » (Harvard University Press, 2015) recensait plus de 4 000 data brokers, aux Etats-Unis, sur un marché de 156 milliards de dollars.

« En 2014, selon la « Federal Trade Commission » (FTC) américaine, l’une de ces sociétés détenait des informations sur 1,4 milliards de transactions réalisées par des consommateurs américains, et plus de 700 milliards d’éléments agrégés ! ».

Ces chiffres pourtant déjà anciens permettent d’appréhender la manne financière dont bénéficie les « data brokers ». D’ailleurs, les grands « data brokers » ont des chiffres d‘affaires supérieurs à un milliard de dollars et emploient plusieurs milliers de personnes.

Aujourd’hui, le marché des données en Europe, représenterait 400 milliards d’euros et certains « data brokers » se targuent d’avoir jusqu’à 3000 données pour certaines personnes (26).

De manière plus tangible, pour appréhender les ordres de grandeur et les enjeux de valeur ajoutée perçus par les investisseurs, penchons-nous sur les données boursières des « data brokers » cotés.

Experian, Equifax, Transunion, Fair Isaac seraient, aujourd’hui toutes dans le CAC 40 : Experian pèse plus de 36 milliards de dollars de capitalisation boursière et la plus petite Fair Isaac pèse plus de 14 milliards de dollars.

Sous le prisme de la performance boursière sur 5 ans, Fair Isaac bat Facebook, Google et Amazon avec 364,36% de croissance du cours de bourse. Le deuxième, Transunion bat Google et Facebook avec 230,61% de croissance du cours sur 5 ans. Quant au dernier de la classe Equifax, sa performance est de 87,71% sur 5 ans à comparer avec 41,5% pour le CAC 40 (27).

Ainsi, les performances boursières sur 10 ans de ces « data-brokers » sont :

  • 3933,96% pour Transunion
  • 1447,52 % pour Fair Isaac
  • 532,41% pour Equifax
  • 341,49% pour Corelogic
  • 258,2% pour Experian PLC

Cet indicateur boursier révèle incontestablement, la valeur intrinsèque des data collectées et stockées et surtout la valeur ajoutée des traitements algorithmiques ou d’Intelligence Artificielle opérés sur ces mêmes « data ».

En effet, ces performances boursières hors normes, à l’image de celle des GAFA, sont concomitantes avec les développements applicatifs pratiques du « Big Data » qui se sont généralisés au cours de la dernière décennie et ont permis un perfectionnement du modèle d’affaires des « data brokers ».

Cette dernière décennie a vu aussi l’arrivée des GAFA dans le marché de la « data » et ils constituent naturellement, aujourd’hui, les plus gros « data brokers ».

L’élargissement du champ des données collectées a été grandement facilité par la numérisation des données physique, grâce entre autres, à la géolocalisation, l’internet et maintenant les plateformes et réseaux sociaux.

Un spectre ou volume de données collectées très élargi

Les données personnelles collectées ne sont pas uniquement les données primaires ou statiques communiquées dans le cadre d’une inscription, d’une ouverture de compte, d’un abonnement et dont les utilisateurs ont formellement connaissance de les avoir transmises. Ces données primaires ou statiques telles que le nom, prénom, la date de naissance, l’adresse email, l’adresse postale, les centres d’intérêts, … s’accompagnent de la collecte de données secondaires et dynamiques issues du monde numérique ou physique que l’on peut aussi qualifier de données d’activité ou d’usage et enfin des métadonnées elles-mêmes de nature variée.

Les « data brokers » collectent des informations à partir d’une série de sources en ligne et hors ligne. Ainsi, ils récoltent des données en provenance des activités sur les réseaux sociaux via des partenariats (pages visitées, clics sur des liens, likes et emoticons utilisés sur Facebook, Twitter, LinkedIn, YouTube…), des données de géolocalisation, des photos, vidéos ou enregistrements audio prises via les smartphones (donc des données du monde physique), des historiques de navigation web via les traceurs (cookies), des historiques des achats en ligne, des informations de type gouvernemental en source ouverte (variables selon les pays), tel que permis de conduire, carte grise, données de recensement, certificats de naissance, actes de mariage, informations sur l’inscription des électeurs, informations sur les véhicules possédés, les partis politiques auxquels les citoyens sont membres ou les abstentions de tout un chacun aux élections.

En matière de données hors-ligne, les « data-brokers » peuvent non seulement utiliser leurs propres données – celles de leurs activités d’origine – ainsi que celles qu’ils ont pu collecter, d’autres partenaires ou clients, notamment celles issues d’outils de Customer Relationship Management (historique des achats, données carte de fidélité). Les clients des « data brokers » sont des entreprises qui souhaitent mieux connaître leurs clients et mieux cibler leurs publicités.

Traitement et usage des données collectées : le microciblage et les produits de prédiction des comportements futurs

Les « data brokers » agrègent, trient et préparent les données de consommateurs collectées pour des entreprises ou annonceurs ayant besoin d’analyses de marché ou de réaliser des campagnes de marketing direct.

Avant l’avènement du Big Data, les traitements réalisés sur les données reposant sur l’architecture des bases de données relationnelles alimentées par des données structurées (28) consistait à utiliser les données primaires ou statiques comme clef primaire unique pour l’agrégation et le traitement des données en provenance des diverses sources.

Ce type d’approche se heurtait à trois limites :

L’avènement à la fin des années 2000 des systèmes Not only Structured Query Language (NoSQL) qui ne nécessitent pas de modèle ou de structure d’enregistrement prédéfini pour fonctionner, couplé avec des calculateurs toujours plus puissants a permis l’émergence du Big Data. Ne pas être contraint par un modèle de données et une structure d’enregistrement rigide permet aux systèmes NoSQL d’accepter des données de types et de tailles très variées : des textes avec des images, des vidéos, etc…

L’inconvénient de cette absence de structuration des données est la nécessité de disposer de capacités plus importantes de traitement et de stockage des données.

Le grand avantage du traitement des données non structurées est que la quantité de données traitées compense le désordre apparent des données et fournit des informations qui n’auraient jamais existé auparavant en raison de la limitation du nombre de relations entre les tables d’une base de données relationnelle du fait de la contrainte de la clé primaire et surtout le moment auquel le « schéma » – structure de la base de données – est appliqué. En effet, à la différence d’une base de données relationnelle, un « data lake » permet de structurer les données au moment où les traitements, corrélations, interprétations et prédictions sont réalisés et non en amont. Cette dernière propriété permet de changer beaucoup plus facilement la structure sans repasser par la phase « ingestion » laissant libre champ au « tâtonnement créatif ». « C’est d’ailleurs notamment grâce à cette méthode que l’application de traduction simultanée de Google a pu faire des progrès considérables en utilisant des quantités colossales de données disparates disponibles sur le net : textes officiels traduits, traductions littéraires, données techniques, etc… » (29).

Outre, la possibilité de segmenter avec plus de finesse les catégories client connues du fait de la multiplicité des sources de données exploitées par les data brokers, ces derniers peuvent combiner les données non structurées grâce à des algorithmes non supervisés et regrouper les clients ou utilisateurs dans de nouvelles catégories (« cluster » en anglais) qui n’auraient pas pu émerger à l’aide d’une approche traditionnelle à base de données structurées. D’où la possibilité de réaliser des micro-ciblages et de prédire les comportements futurs. C’est bien là que réside la véritable valeur ajoutée : le traitement des données par des algorithmes nommés communément Intelligence Artificielle (30).

Ainsi, la nature et le nombre de données collectées et traitées dépassent largement le nombre des quelques données primaires communiquées par l’utilisateur, ce qui nous conduit à introduire la notion de consentement de l’utilisateur.

Quid du consentement de l’utilisateur ou de l’internaute ?

Un consentement pour être valide doit être positif et éclairé. Ceci signifie, d’une part, que le consentement se manifeste par une action positive de l’utilisateur qui doit être préalablement informé des conséquences de son choix et qui doit disposer des moyens d’exercer son consentement. Des systèmes adaptés doivent donc être mis en place à cette fin.  Ils sont présentés de manière préalable à l’insertion ou à la lecture du traceur (« cookie »). Avec le RGPD, il doit être, en théorie aussi simple de refuser de donner son consentement que de le donner.

D’autre part, pour que le consentement soit éclairé, il est nécessaire que l’information fournie à l’utilisateur soit rédigée en des termes simples et compréhensibles par tous. Elle doit aussi permettre aux internautes ou utilisateurs d’applications mobiles d’être parfaitement informés des différentes finalités des traceurs y compris des finalités de traitement des données communiquées.

En pratique, l’utilisateur ou le consommateur n’a conscience de donner que les données primaires et statiques demandées expressément. Avoir connaissance « du reste » nécessite d’une part une lecture longue et fastidieuse des CGU, conditions générales d’utilisation qui sont rédigées sur la base du droit anglo-saxon en raison du poids des acteurs américains et d’autre part, de comprendre réellement ce qui est lu, c’est-à-dire non seulement ce qui est écrit mais aussi les non-dits associés sur les implications pratiques du traitement des données collectées. Ce dernier point nécessiterait une connaissance approfondie des techniques de marketing devenues extrêmement sophistiquées avec l’avènement du Big Data.

Quel utilisateur prendrait le temps de lire les CGU et surtout quel utilisateur comprendrait réellement ce qu’elles impliquent ?

Nous pouvons donc conclure, selon nous, qu’il y a un vice du consentement par le dol au motif que d’une part l’utilisateur ne sait pas réellement quelles sont les données collectées et d’autre part, il ne sait pas quel usage en est fait.

Ainsi, deux siècles après l’empire américain du coton, les mêmes moteurs de la gratuité – des données personnelles collectées – et du vice du consentement inhérent à leur collecte et leur traitement permettent, une fois de plus, aux Etats-Unis d’obtenir un surcroît de puissance économique décisif.

L’esclavage et le capitalisme sont en totale contradiction selon les schémas de pensée traditionnels des libéraux anglo-saxons. En effet, le capitalisme repose sur le travail rémunéré et librement consenti tandis que l’esclavage repose sur le travail quasi-gratuit et la coercition physique, expression ultime du vice du consentement. Or, l’Histoire semble contredire la contre-vérité économique bien établie sur l’incompatibilité du couple capitalisme américain/esclavage. Et au-delà de cette contre-vérité, le capitalisme américain ne serait-il pas, au contraire, jamais aussi fort que lorsqu’il s’appuie sur la gratuité et le vice du consentement ?

Enfin, tout comme les stigmates du capitalisme racial américain hérités du XIXème siècle sont encore visibles de nos jours dans la société américaine à travers les violences policières entre autres, nous pouvons nous risquer à penser que l’opacité des GAFA et des « data brokers » sur leur mode réel de fonctionnement, la surveillance de masse intrinsèque à leur modèle d’affaires et les « produits de prédiction » ensuite revendues sur le marché des comportements futurs sont en contradiction frontale avec les valeurs des pères fondateurs des Etats-Unis et pourraient avoir, à l’avenir, de lourdes conséquences sur la démocratie américaine.

Notes

  • Nous écartons volontairement Microsoft de notre propos car la gratuité est étrangère au business model d’origine de Microsoft.
  • Selon Olivier de Maison Rouge, Christian Harbulot et Ali Laïdi, l’économie et le monde des affaires sont parties intégrantes des préoccupations des services de renseignement américain. Les éléments de compréhension et les éléments factuels i.e. les grilles de lecture permettant cette affirmation sont consultables dans leurs articles respectifs dans le numéro « Prospective et Stratégie » de Décembre 2019 sur la thématique du Renseignement.
  • Edward Baptist, The Half Has Never Been Told: Slavery and the Making of American Capitalism 2014
  • La première révolution industrielle se situe entre 1770 et 1850. Elle est symbolisée par l’apparition de la machine à vapeur, le chemin de fer, l’industrie textile et sidérurgique, 

La seconde révolution, de 1850 à 1914, est celle de l’électricité, des bateaux à vapeur, du pétrole, de l’industrie chimique et de l’automobile.

  • La première révolution industrielle touche, dans un premier temps, le Royaume-Uni, qui se transforme rapidement dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle. Plus précisément, certaines régions se spécialisent dans l’industrie, comme le Nord de l’Angleterre, autour de Manchester, Birmingham ou Liverpool. D’autres pays suivent rapidement le mouvement : la Belgique commence à s’industrialiser dès la fin du XVIIIe. En France, la première ligne de chemin de fer est construite dans les années 1830, tandis qu’en Allemagne, l’industrialisation ne commence que dans les années 1850, en même temps qu’aux Etats-Unis.
  • Anne Farrow, Joel Lang, Jenifer Frank, Complicity: How the North Promoted, Prolonged, and Profited from Slavery, chapitre 1

« Before Whitney patented his gin, it took one person an entire day to remove the seeds from a pound of cotton. The gin both mechanized and accelerated the process. The teeth of a series of circular saws “captured” the seeds, allowing the fibers to be pulled away from them. The device increased the production of cleaned cotton an astonishing fiftyfold. In seeking a patent for his invention, Whitney wrote to Thomas Jefferson, then secretary of state, explaining that by using the gin, “one negro [could] . . . clean fifty weight (I mean fifty pounds after it is separated from the seed), of the green seed cotton per day.” Jefferson was one of the first plantation owners to order a gin »

  • Bien entendu, la data est déterminante dans d’autres domaines que l’économie tels que la défense et la sécurité intérieure.
  • Edward Baptist, The Half Has Never Been Told: Slavery and the Making of American Capitalism, 2014, page 114.
  • J.M. Roberts, O.A. Westad, Histoire du Monde l’âge des révolutions, Tome 3, édition Perrin, page 101.
  • Edward Baptist, The Half Has Never Been Told: Slavery and the Making of American Capitalism, 2014, page 114.
  • Sven Beckert, Empire of Cotton : A Global History,  Chapter Nine : A War Reverberates Around the World, 2015

Selon Sven Beckert, professeur d’histoire à Harvard, l’histoire mondiale du coton est aussi celle du capitalisme. Note de l’auteur : cette histoire mondiale du coton qui remonte à plusieurs siècles et couvre de nombreuses géographies serait le premier témoin des évolutions de la mondialisation, notamment, selon nous, d’une forme particulière de la mondialisation nommée globalisation en ce qu’elle constitue une mondialisation « homogénéisante » des cultures qui se manifestent par une convergence grandissante des aspirations individuelles et des représentations ou perceptions du monde. En bref, la globalisation pourrait être une mondialisation accompagnée de l’encerclement cognitif de la culture dominante de l’époque. Il est curieux de constater que ce livre n’est pas traduit en français.

  • Edward Baptist, The Half Has Never Been Told: Slavery and the Making of American Capitalism, 2014, page 114.
  • Sven Beckert, Empire of Cotton : A Global History,  Chapter Nine : A War Reverberates Around the World, 2015
  • La Nouvelle-Angleterre est composée de six Etats : Maine, Massachusetts, New Hampshire, Vermont, Rhode Island et Connecticut.
  • Il est à noter qu’un rouet à coton est représenté sur le drapeau indien.
  • J.W. Davidson, W.E. Gienapp, C.Leigh Heyrman, M.H. Lytle, M.B. Stoff, Nation of Nations : a concise narrative of the American Republic, Mac Graw Hill, 2ème édition, page 325. Il s’agit d’un ouvrage collectif utilisé dans certaines universités américaines pour les cours d’histoire au niveau Freshmen ou Sophomore soit respectivement les premières et deuxièmes années d’université aux Etats-Unis.
  • J.W.Davidson, W.E. Gienapp, C.Leigh Heyrman, M.H. Lytle, M.B. Stoff, Nation of Nations : a concise narrative of the American Republic, Mac Graw Hill, 2ème édition page 403.
  •  8th US Census de 1860, Introduction viii (page 6) et ix (page 7), US Bureau of Census
  • Marie-Jeanne Rossignol, L’Atlantique de l’esclavage, 17751860 : Race et droit international aux ÉtatsUnis, en GrandeBretagne et en France, dans Transatlantica, revue d’études américaines, 2002.
  • Article 1109 du Code Civil version 1804 : « Il n’y a point de consentement valable si le consentement n’a été donné que par erreur ou s’il a été extorqué par violence ou surpris par dol ».
  • Anne Farrow, Joel Lang, Jenifer Frank, Complicity: How the North Promoted, Prolonged, and Profited from Slavery, chapitre 1

“It is proper, however,” Andrews, who worked for the secretary of state, said, “to state that many of the most intelligent cotton planters of that region insist that their now generally conceded superiority is not so much attributable to any radical difference of the soil or dissimilarity of the climate in that region . . . as it is to the advantages, afforded by the aggregated and combined, and cheap, and reliable labor they derive from that patriarchal system of domestic servitude.”

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  • Les données structurées dépendent d’un modèle fixe. Elles s’inscrivent au sein d’un champs déterminé par un nombre de caractères et une nature de caractère alphabétique et/ou numérique. Le champ est une partie d’un enregistrement qui est lui-même inséré dans une table de données. Cette table de données peut être mise en relation avec les autres tables de la base de données relationnelle à l’aide d’une clé primaire commune aux tables sur lesquelles on souhaite faire une requête en « Structured Query Language ». La clé primaire doit être unique et peut être composée d’un ou plusieurs champs de données tant que la propriété d’unicité de la clé est respectée.
  • Amaël Cattaruzza, Géopolitique des données, Paris, Editions Le Cavalier Bleu, 2019
  • Le concept d’Intelligence Artificielle ne recouvre pas uniquement les algorithmes non supervisés.