Le protectionnisme américain

Comment aborder le protectionnisme américain ?

Pendant très longtemps, la question du protectionnisme américain est resté une chimère. Les grandes écoles de commerce ont fui ce débat. L’explication est hélas relativement simple. Les chercheurs craignaient des retombées négatives, en termes d’image dans la communauté internationale des sciences humaines, et plus particulièrement dans les structures qui s’occupaient d’analyse économique au sens large du terme. Le fait d’aborder ce sujet dans un article destiné à être publié dans une revue côté A les exposait à une forme de refus déguisé de la part de leurs confrères anglo-saxons. Le prétexte le plus souvent évoqué à ceux qui ont tenté d’aborder le sujet sur le sol américain, était que ce type d’argumentation relevait plus du fantasme que de l’argumentation scientifique telle qu’elle était conçue dans les milieux académiques nord-américains.

Il existe pourtant des repères visibles de cette démarche dans l’histoire économique du monde anglo-saxon comme le démontre l’ouvrage réalisé en 2017 sous la conduite de Christian Harbulot : le nationalisme économique américain.

Le débat sur cette question délicate implique une approche historique qui prenne en compte la spécificité des intérêts de la puissance américaine depuis ses origines.

Les Etats-Unis se sont créés en s’emparant des territoires des peuples indiens. En faisant ce rappel, il ne s’agit pas d’utiliser cette évidence historique pour ostraciser la mémoire des personnes de différentes origines qui ont émigré sur ce continent. La création des Etats-Unis s’est faîte à partir d’une démarche de colonisation intérieure. Dès le début du XIXè siècle, la nouvelle République américaine a cherché à se construire en opposition avec la dynamique de puissance des empires coloniaux européens. Cette rivalité n’a pas empêché les Etas du Sud à exporter leur coton vers les manufactures textiles britanniques. Dans le même temps, les Etats du Nord protégeaient la naissance de leur appareil industriel en limitant l’accès de leur marché intérieur aux industriels du vieux continent.

La question du protectionnisme a divisé le monde américain. Il a été un des facteurs sous-jacents du déclenchement de la guerre de sécession. Les vainqueurs nordistes ont imposé une politique protectionniste qu’ils ont su habilement faire passer au second plan de leur image d’économie de marché ouverte sur le monde.

Au cours du XIXè jusqu’à la fin du XXè siècle, cette politique protectionniste a évolué par la suite en fonction des intérêts économiques de la puissance américaine. Lors des périodes d’expansion, le pouvoir politique américain a limité les mesures protectionnistes et il les a rétablit lors des phases de crise ou de récession.

A partir des années 90, la puissance économique américaine subit la pression conjuguée du renouveau de l’économie asiatique et européenne. Cette nouvelle donne oblige les différents gouvernements des Etats-Unis d’Amérique à durcir leur dispositif de guerre économique (doctrine de sécurité économique sous les deux mandats de Bill Clinton, politique offensive au Moyen Orient en partie motivée par l’enjeu vital du pétrole, tentatives d’instauration de traités transpacifique t transatlantique pour contenir l’économie chinoise).

La politique « America first » de Donald Trump est le révélateur de cette politique d’affrontement économique tous azimuts.


Lire à ce propos l’étude menée par Thérèse BUCHMÜLLER, Aymeric DUCLOS, Augustin de COLNET, Hugo CONTARD et Maxence de LORGERIL, élèves de la SIE 22 de l’Ecole de Guerre Economique.